Bertrand, lecteur de La Bruyère

     Jacques Bony note, dans sa présentation de Gaspard de la Nuit, que le Marchand de tulipes, le Raffiné, le Donneur de sérénades ou le Bibliophile doivent autant à Hoffmann ou Callot qu’à La Bruyère. Si important qu’ait pu être l’intérêt littéraire pour la tulipe au XIXe siècle –Dumas, Balzac, Baudelaire en témoignent –, c’est pourtant en effet immédiatement au Fleuriste du moraliste classique que nous pensons en lisant « Le Marchand de tulipes » . Nous pourrions croire que la fascination contemporaine pour les Caractères produit cet effet de réception abusivement, au détriment des influences graphiques et littéraires explicitement revendiquées par le poète, si un faisceau d’indices ne tendait à confirmer que Bertrand pensait réellement au caractère de La Bruyère lorsqu’il composa le premier livre de Gaspard de la Nuit et que « Le Marchand de tulipes », plus qu’une vague réminiscence ou l’un des nombreux miroitements littéraires créés par les dédicaces et les épigraphes, a probablement été conçu comme une réponse au texte du moraliste catholique.
par Nathalie Ravonneaux

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